Fragments de M’Nar

Renaissance

 

Jérémy Bérenger ©

 

 

La Cité se dressait, orgueilleuse et sublime

Dans la blondeur offerte du petit matin

Eolig nous guidait, impavide et critique

Nous étions tant et plus, chacun seul avec soi

Epuisé par sa Queste, enfant redevenu

Nous étions parti quand ? Cela faisait longtemps

Nous ne nous en souciions, pas plus que du tribut

Payé à ce désir, ancré en nos tréfonds

D’enfin gagner les cîmes de l’Eternel Levant.

 

Le Narthex nous franchîmes, d’émeraudes serti

Des Idoles Vigiles en flanquaient la grand’porte

Sur nous tous harassés, elles daignèrent étendre

De leurs dextres multiples, leur millénaire grâce.

 

Sylumbra Digne Infante, la plus belle de nos femmes

Avait son âme pure et son corps inviolé

En elle que j’aimais du plus candide amour

Venait de s’incarner le Seul Dieu Incréé.

 

Il fut écrit jadis qu’en un dernier combat

A jamais tarirait l’iniquité des hommes

Nous étions tant et plus, chacun seul avec soi

Anobli par sa Queste, enfant revendiqué

Nous étions parti quand ? On ne le savait plus

Tant la marche fut longue et les lieues assombries

Par ces nuées amères décrétées par des fous

Que rien n’arrêta plus, un certain jour dernier

Ni les cris ni les pleurs d’hyménées éventées

Ni les fleurs ni les larmes à jamais desséchées....

 

Point colosse ni stylite, dans l’or blanc façonné

Accueillant l’impétrant d’un muet Namasté

Etait une effigie d’un Grand Sage Védique

 

La première, Sylumbra à ses pieds s’inclina

Eolig déclamant, couvert par les Sept Vents

Les sutras seuls connus des Initiés Suprêmes

 

Par de ces charmes qui dès lors seraient de nos coutumes

L’Oeil Transcendant au front de l’Infante parut

Un rite préludant aux Définitives Noces

Nous prédit Eolig, à la fois druide et barde

 

 

J’épouserai l’Infante, pour l’avoir vue en songe

Et lui avoir souri avant qu’elle ne me dise

Rien n’est jamais hasard, ni ta mort ni l’amour

La Pierre est sur ton front, et tu ne peux la voir

La Pierre est sur mon front, et je ne la voyais

Sylubra l’y trouva et me la révéla

Et Sylumbra m’aima sitôt que je l’aimai

 

                       Ils ont souillé l’Amour, les femmes ils ont salies

                                 Ils ont troublé les eaux, du feu ils ont puni

                                             Ceux qui ne quémandaient que pitance et justice

                                                               Ceux qui s’agenouillaient pour réclamer la paix

 

                                                               Ils ont brisé l’espoir, Demain ils ont tué

                                             Ils ont marbré les cieux, la plèbe ils ont flattée

                                 Pour mieux l’asservir d’illusoires rédemptions

                       Pour mieux l’anéantir sous leurs ardentes salves

 

Au creux de l’Athanor Sylumbra déposa

Deux graines de pavot antérieures à Gaïa

Au millième matin, Eolig cueillerait

Deux anneaux enlacés, fusion de nos deux âmes.

 

Il fut écrit jadis qu’en un sursaut de Gloire

Irradieraient enfin d’humilité les hommes

Nous étions tant et plus, chacun seul avec soi

Magnifié par sa Queste, Etre redevenu

Nous étions partis quand ? Un jour, il faut partir

Et marcher, non s’enfuir

Et aimer, et en jouir

Shambhalla est ainsi, au détour de l’angoisse

Shambhalla est intime, si intime Alchimie.