Je suis natif de Sedan, dans les Ardennes, à quelques dizaines de kilomètres de la bonne ville de Stenay. Une cité paisible, comme beaucoup de petites villes de province qui n’attirent guère l’attention et flirtent souvent avec l’ennui . C’est tout juste si son “ Musée de la Bière ” arrivait à m’arracher, lors de mes rares passages, un minimum d’intérêt ; il est vrai que la visite d’une impressionnante série d’alambics se termine généralement par une dégustation…… de fée mousseuse…… Le temps fit son œuvre, et j’avais fini par oublier cette localité sans relief particulier. Je la retrouve aujourd’hui dotée de l’enviable statut de “ cité magique ”, liée par de mystérieux réseaux à Gisors et à ses templiers,  à Rennes-le-Château et à son trésor. Je la redécouvre frappée du sceau de Satan. Je la surprends étouffant en son sein les derniers soupirs d’une dynastie mérovingienne qui ne veut pas s’éteindre. Et j’apprends qu’elle cache une pierre mystérieuse à la lourde signification ésotérique. Arrêtons là la description des nouveaux atouts sulfureux de la cité meusienne pour nous pencher sur la genèse de cet étrange mythe.

STENAY

ET

LE MYTHE

Phlippe Marlin ©

L’histoire “ officielle ” de Stenay est pourtant assez simple… L’excellent petit guide [1] édité par le Cercle Saint-Dagobert II, nous dit :

Au Nord‑Ouest de la forêt de Woëvre, sur la rive droite de la Meuse, au milieu d'un bassin arrosé par ce fleuve, et sur le canal de l’Est, la ville fut toujours une importante place de guerre.

Connu déjà à l'époque celtique, devenu oppidum à la période romaine, le lieu était particulièrement recherché à cause de son importante position sur la Meuse, à l'entrée de la Woëvre. Thierry, fils de Clovis, devenu roi d'Austrasie, frappé de la position de Stenay, y fit bâtir un palais ; le bourg devint villa regia et chef-lieu d'un comté. Lui-même, son fils et son petit-fils se firent enterrer dans la chapelle castrale. En 679, Dagobert Il y demeura.

Au Xe siècle, Stenay appartenait à la maison d'Ardenne; elle devint ensuite la possession des ducs de Bouillon; en partant pour la Croisade, Godefroy de Bouillon vendit la ville avec le château qu'il avait fait construire en 1077 à l'évêque de Verdun qui l'engagea au comte de Luxembourg en 1110. Ce dernier vendit Stenay à Renaud, comte de Bar, et jusqu'en 1641 la ville demeura presque constamment en la possession des maisons de Bar puis de Lorraine.

De 1609 à 1611, elle reçut de nouvelles fortifications et devint une importante place de guerre. Louis XIV en donna la propriété en 1646 au prince de Condé. Comme celui-ci était passé au parti de l'Espagne, le roi en ordonna le siège. Fabert l'entreprit en 1654 en présence du souverain lui-même; il dura 56 jours. Par le traité des Pyrénées en 1659, il lui rendit Stenay qui fut néanmoins démantelé en 1689. Ses descendants en jouirent jusqu'à la Révolution française

Stenay fut un chef-lieu de bailliage de 1639 à 1697 puis d'une prévôté et en 1790 d'un district comprenant 75 municipalités. La cité tint tête aux Autrichiens en 1792 et fut occupée pendant toute la guerre de 1914‑1918 par les Allemands. Le Kronprinz y eut son Quartier Général.

Il reste à Stenay une usine métallurgique et une papeterie.

AUX SOURCES DU MYTHE

En fait le mythe va se former en 1973, à la publication par Gérard de Sède d’un ouvrage au titre “ sensationnel ”, La Race Fabuleuse, extra-terrestres et mythologie mérovingienne (éditions J’ai Lu, collection “ l’Aventure Mystérieuse). De Sède est un créateur de légendes bien connu, ayant déjà sévi sur Gisors et son trésor ainsi que sur Rennes-le-Château et le secret de l’abbé Saunière. Il récidive cette fois pour nous expliquer, en substance, que la dynastie mérovingienne était..... d’origine extra-terrestre....... Et d’opérer, dans le cadre de sa démonstration, un large détour par Stenay. Essayons de reprendre les points marquants de l’ouvrage tout en précisant que la source de l’auteur est largement spéculative, puisqu’elle repose sur une série d’entretiens avec un mystérieux Marquis de B. dont l’identité ne nous sera pas révélée.... [2]

- Sur le blason de la ville figure la face grimaçante et cornue du démon, une figure pourtant jamais utilisée en héraldisme......Après enquête locale, étude des travaux d’un archéologue du XIX ème siècle, un certain Jeantin, et conversations avec le Marquis de B, de Sède arrive à la conclusion que Stenay s’est autrefois appelée Shatan, puis Shatenay. Toujours d’après l’archéologue, “ l’appellation de Shatan est à la fois géologique, cosmogonique et hébraïco-celtique, c’est là le brevet d’antiquité le plus incontestable de Stenay ”. Et de voir effectivement une connection hébraïque évidente avec notre paisible région qui abrite les villages de Baalon (le dieu Baal) et d’Avioth (av en hébreu signifie ancêtre).....

- Notre archéologue romantique, pour reprendre la fameuse expression de Jacques Bergier [3] , se met ensuite à la recherche de l’église Saint Dagobert, édifiée sur les ruines d’un temple dédié à Saturne, mais dont on a perdu la trace au cours de l’histoire. Grâce à une vieille gravure, il finit par la localiser sous les maisons Matton et Laplante [4] .

- Le lien étant opéré avec les Mérovingiens, on nous explique alors que cette dynastie était d’origine hébraïque et sacrée. Le sources sont toujours notre bon Marquis de C et un ouvrage écrit sous le pseudo d’Henri Lobineau [5] , “ Généalogie des Rois Mérovingiens ”, trouvé à la Bibliothèque Nationale. On nous apprend également que les rois mérovingiens ont été “ faits néant ”, car oubliés progressivement par l’histoire......... Le dernier des souverains, Dagobert II, fut assassiné près de Stenay, dans la forêt de la Woëvre. Et de  fait, Dagobert avait bien un fils, Sigebert, mais qui fut tué lors d’une chasse au sanglier. Là s’arrête l’histoire “ officielle ”.  Mais elle cède rapidement la place à l’histoire “ romantique ”, puisque d’après une chronique de l’époque, “ Le Livre des Evêques de Strasbourg ” de Bruschius, Sigebert fut ressuscité grâce à l’intervention de Saint Argobaste. De Sède, bien connu pour son rationalisme, précise utilement qu’il ne faut certainement pas croire à ce type de légende, l’héritier étant vraisemblablement tombé dans le coma suite à l’accident de chasse. L’affaire se termine, selon certains historiens (non cités), par l’exil du monarque, soustrait par sa sœur Irmine aux menaces des nouveaux dirigeants (les “ pépinistes ”), en Septimanie, c’est à dire dans la région du Haut-Languedoc.

Abandonnons ici la lecture de cet ouvrage, la suite étant une traque du Grand Monarque à travers les siècles pour aboutir à la révélation ultime, faite bien sûr par le Marquis de B, à savoir l’origine extra-terrestre des Mérovingiens. Précisons cependant que d’après un vieil ouvrage découvert à Bruxelles par l’auteur, des tombeaux auraient été retrouvés au XVIII ème siècle dans les cryptes de l’église Saint Dagobert, révélant également que les Mérovingiens pouvaient être de grande taille..... Des Géants venus d’Ailleurs......

Reprenons les données du mythe :

STENAY, LA CITE de SATAN

En fait, nul besoin de faire de laborieuses recherches. La clef de l’énigme nous est donnée au syndicat d’initiative par un petit tract “ le nom de Stenay ” qui résume parfaitement les travaux réalisés par les historiens locaux.

LE NOM DE STENAY

L'origine du nom de Stenay s'est perdue. Mais depuis un siècle, une bataille d'érudits s'est engagée pour essayer de la préciser.

En effet, les armes de la ville (“d'argent au chevron d'azur accompagné en pointe d'un lion d'or armé et lampassé de gueule ... ”, ainsi que les décrit Denain avant la Révolution) sont directement inspirées de celles de Godefroy de Bouillon 11e s.).  Mais à la fin du 19e, et peut-être à cause de la publication par Jeantin dans son “Manuel de la Meuse” (1860) d'un article sur SATHENA Y ou SATHANAY, on vit l'écu de la ville bientôt sommé d'une petite figure de diable, cornue et grimaçante. Jeantin cède en effet à la manie de son temps : tout expliquer “scientifiquement”, et il écrit: “L'appellation SATHAN est, à la fois, géologique, cosmogonique et hébraïque ... ” De là à faire de Stenay la ville de Satan, il n'y avait qu'un pas, vite franchi par les amateurs d'originalité. Dès 1885, le papier à entête de la mairie porte cette nouveauté héraldique et, lorsqu'en 1925 l'Hôtel de Ville actuel va remplacer la vieille maison commune de la Porte de Bourgogne, l'architecte croit bon défaire sculpter au fronton (mais non dans le grand salon) la célèbre face du diable.

Célèbre en effet car depuis lors, on en a beaucoup parlé: historiens, héraldistes, linguistes, romanciers même, et citoyens de Stenay aussi ‑ qui ne prennent cependant pas trop au sérieux leur prétendue origine diabolique, puisque les “Crottes de Satan” sont devenues une spécialité de la confiserie locale et que le Maire, voulant agrémenter l'institution d'une médaille commémorative de la ville en fit l'insigne d'une “Confrérie des Diablotins de Stenay” créée sur le mode souriant en Juin 1983...

Le chanoine Vigneron, curé doyen de Stenay de 1941 à 1966, passionné d'histoire locale et savant linguiste [6] , n'allait pas, bien sûr, accepter cette étymologie. Il dresse d'abord la liste assez impressionnante des anciennes appellations de Stenay au travers des actes historiques authentiques, puis ses déductions, qui paraissent bien conduites, l'amènent à conclure que Stenay pourrait signifier “ Villa de Setinius”, personnage du ler siècle après J.C. originaire de la cité de Setia (Sezze aujourd'hui) à 80 km au S.E. de Rome...

Voici quelques variantes puisées dans le tableau qu'il dresse de 25 noms recensés de la ville, avec leur époque d'apparition : SATENAIUM et SATANIACUM (10 ème s.), SATANACUM (1069), SATINNACUM et SATINIA CUM (1086), SETUNIA (Ile S.), SEPTINIACUM (1107), SETENAE (1208), SETTENAI (1243). SATANAY (1284), sans oublier le SATHANAI du sceau de la Prévôté (1320) et le STENA du patois local. Mais il faut attendre 1643 pour trouver enfin écrit le nom de STENAY.

OFFICE DE TOURISME
SYNDICAT D'INITIATIVE
DU PAYS DE STENAY
Place R. Poincaré ‑ 55700 STENAY
Tél. 03 29 80 64 22 ‑ Fax 03 29 80 62 59

Je n’ai évidemment pas pu m’empêcher de remonter aux sources et d’acquérir à la librairie de la ville l’ouvrage de référence, “ Grandes Heures de l’Histoire de Stenay ” par l’abbé Vigneron [7] .

Alors, Il faut renoncer à faire de Stenay la « ville de Satan. Jamais le mot de Satan n'aurait dû être retenu pour expliquer le nom de Stenay.

Voici trois raisons péremptoires d'exclure cette explication :

1) Le nom de Satan était complètement inconnu chez nous quand le nom de Stenay s'est formé, pour la bonne raison que Satan est un mot hébreu qui n'a pénétré chez nous qu'avec l'Evangile, donc guère avant le Ve siècle pour notre région : trop tard pour entrer dans le nom d'une localité gallo-romaine qui remonte à 50 avant J.‑C.

2) A supposer par impossible qu'on ait pu loger ce mot hébreu (Satanas) dans le nom de notre ville, ce nom aurait été alors si facile à retenir que nous n'aurions pas 25 formes, mais une seule forme de ce nom dans les archives, et le nom lui-même de « Stenay », dont l'avant-dernière forme était Settenay, n'aurait pu exister phonétiquement; ni historiquement non plus, car les Stenaisiens du Moyen-Age n'auraient pas admis que leur ville soit appelée la cité de Satan. L'Académie française n'a admis le mot « satanique ‑ qu'en 1798 et celui de –«satané » en 1878 seulement.

Chacune de ces deux raisons était suffisante à elle seule pour exclure cette explication du nom de Stenay. En voici pourtant une troisième.

3) JAMAIS PERSONNE avant 1850 n'avait sérieusement pensé à loger Satan dans le nom de Stenay; il a fallu que se trouve à Montmédy un ancien président du tribunal, qui fut le premier à éditer sur l'histoire du Nord‑Meusien un livre important en trois tomes. Jeantin, c'est son nom, avait une manière insensée d'expliquer les noms de lieux qui faisait le désespoir de sa famille. Sa nièce, Madame feue Pérot de Médy‑haut, le jugeait complètement égaré dans sa manie aberrante d'expliquer tous les noms de lieux par des racines hébraïques et des considérations géologiques si farfelues que personne ne peut les prendre au sérieux. .

« MAIS UN LIVRE RÉCENT A RETENU L'OPINION DE JEANTIN ! » ‑ C'est vrai d'une certaine façon , Gérard de Sède, dans un livre de poche intitulé « La race fabuleuse », a soulevé sur l'histoire des mérovingiens toute une série de questions qu'il ne cherche pas à résoudre dans cet opuscule ; G. de Sède s'est bien gardé de prétendre écrire un livre d'histoire. Certes il n'invente pas, mais sa manière de présenter « ce qu'il a lu » n'est ‑pas celle d'un chercheur critique, mais celle d'un homme qui désire avant tout étonner et faire rêver ses lecteurs sur ce que d'autres ont pu écrire au sujet d'évènements mal connus. Il est possible qu'il se soit amusé le premier à découvrir ce qui a été écrit par des auteurs de tous les temps sur les sujets qu'il aborde ; et il préfère les plus bizarres. Pour lui, UN LIVRE DE JEANTIN EST UNE AUBAINE : en fait de bizarreries et de solennelles affirmations non contrôlées, il va être servi, mais il n'est pas dupe, et parfois il le fait voir.

C'est bien le cas pour l'explication du nom de Stenay: croyez-vous qu'il ait pu écrire au sérieux cette phrase réelle de Jeantin (promu par lui archéologue) « L'appellation Sathan est à la fois géologique, cosmogonique et hébralco‑cerltique c'est là le brevet d'antiquité le plus incontestable pour la ville de Stenay » (page 20). A la page 13, de Sède affirme que le nom de Stenay dérive à la fois de Sathan et de la Pierre (en allemand Stein). Disons qu'on accumule les invraisemblances, puisque dans la même page 13, l'ancien nom de Stenay signifie, en plus, « Domicile de Saturne »... Concluons que ni Jeantin, ni de Sède, n'apportent aucune lumière à l'explication du nom de Stenay. Ils esquivent tous deux la question ; De Sède ne veut pas expliquer, Jeantin ne sait pas.

LA PIERRE MYSTERIEUSE DE STENAY

La crypte Saint-Dagobert II de Stenay nous montre une mystérieuse pierre, reconstituée par Gino Frua, membre du Cercle. Voilà ce qu’en dit l’Abbé Vigneron dans son “ histoire de Stenay ” :

LA PIERRE MYSTERIEUSE ":

Le Carré SATOR Documents tirés de l' " Histoire de Stenay " de l'Abbé Vigneron

CHRETIENS CLANDESTINS A STENAY

 Il nous semble que cette pierre mystérieuse peut s'expliquer comme un geste de chrétien en un temps où les chrétiens n'étaient qu'un petit nombre à Stenay.

Pour l'expliquer, il faut rappeler que toutes les pierres sculptées trouvées à Stenay se trouvaient dans les fondations de la basilique St-Rémi, antérieure à l'église St-Dagobert qui l'a remplacée au IX ème siècle,

Ces pierres, réemployées dans les fondations, étaient des stèles funéraires : celle dont nous parlons est aussi une stèle, mais d'un genre particulier.

Mr Plantard, en travaillant sur l’histoire de Stenav, a étudié cette stèle : il estime que les lettres gravées à gauche et le chevron tracé à droite de ces lettres étaient une "clé" capable de permettre à des initiés de se reporter au fameux "Carré Sator'.

C'est pourquoi nous reproduisons ci-contre ce carré Sator bien connu. Notre dessin du carré a volontairement grossi certaines lettres pour faire comprendre l'explication de M. Plantard : ces lettres SRNPR, remises à leur place dans le carré, dessinent exactement le chevron gravé sur notre pierre. M. Plantard a donc bien trouvé la clé qui explique les lettres mystérieuses de la stèle de Stenay.

SIGNIFICATION DU CARRE

Le carré sator contient 5 mots qui peuvent se lire dans tous les sens : SATOR, AREPO, TENET, OPERA, ROTAS. Les païens, qui ont utilisé le carré avant les chrétiens, plaçaient le mot ROTAS en tête, à la place du mot SATOR (ainsi Pompéi). Cette inversion de deux mots, ne change pas le sens :

Le créateur (SATOR), passons AREPO, qui n'a de sens qu’en le disant à l’envers, tient (TENET) avec soin (OPERA) les roues (ROTAS) Autrement dit : Celui qui a fait, qui a '« semé ' (la vie, l'homme, le monde) surveille, dirige soigneusement sa marche. Et pour les chrétiens : le Créateur de l'homme en est aussi la Providence.

SIGNIFICATION DE LA PIERRE DE STENAY

L'occultisme de cette stèle suppose qu'elle a été gravée en un temps où les chrétiens ne pouvaient se manifester ouvertement : nous la daterions volontiers de la fin du V ème siècle ou du début du VI ème, époque où une poussée de zèle païen s'exprime, par réaction, après la conversion Clovis en 496.

Malheureusement la dite pierre de Stenay n'est plus à Stenay Elle avait été déposée vers 1910 par M. Rivart chez Mgr Mangin, curé de Stenay, habitant alors place du Marché. M Mangin, mort en 1914, n’a pas été témoin de l'enlèvement de cette pierre en 1917 par le  fameux Kronprinz, qui l'aurait fait briser ensuite en déclarant (c'est curieux) qu'il était le " Maître de la Croix ". Ainsi a disparu, (une fois de plus un monument intéressant pour l'Histoire).

C.Vigneron

La reconstitution de la " pierre de Stenay, est l’œuvre de  Gino Frua, membre du Cercle.

Cette pierre est exposée dans la crypte Saint Dagobert Il.

S

A

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A

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0

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A

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0

T

A

S

L’ineffable Plantard a manifestement sévi dans ce décryptage. Le carré Sator est pourtant bien connu des cabalistes et autres alchimistes du verbe. Nous trouvons par exemple dans “ L’Actualité de l’Histoire Mystérieuse [8]  ” :

LE CARRE DE SATOR

Avec le carré de Sator, on retrouve le temple et le projet originel. Multiples sont les manières de le décrypter et cependant, il conserve son caractère énigmatique. Cabale de lettres ou sens caché, sa signification demeure encore incertaine.


SATOR - AREPO - TENET - OPERA - ROTAS


5 mots, 5 consonnes et 3 voyelles, déjà le 8 de l'infini. La croix de TENET a pu faire dire à certains qu'il s'agissait d'un symbole chrétien. Ne nous égarons pas : il s'agit du Grand Œuvre. Celui qui signe du carré SATOR a su réaliser la Pierre.


SATOR, c'est le Laboureur. Ceux qui oeuvrent par la vole humide, lente mais dextre, se prétendent des jardiniers, travaillant avec assiduité, car pour eux, le temps n'est que fluctuation de saisons tournant en rond. A un niveau plus subtil, il est le Créateur.


AREPO serait un instrument aratoire, dans les langues celtisantes. Les Gaulois ont inventé la charrue, plus opérative que la binette du jardinier, pour fendre la Terre ou la materia, dont on doit s'emparer par une opération magique, dans un temps favorable.


Mais il faut la tenir fermement et voici TENET. Le laboureur tient la croix qui structure l'édifice ou la charrue qui opère.


OPERA : c'est l’œuvre, la réalisation tant dans un plan matériel - la Pierre - que dans un autre plus éthéré - le bel canto. Notre jardinier a les manches en main et il est sur la voie de la réalisation de l'Œuvre.Rotas, les roues, correspond à SATOR inversé. En fait, le carré de SATOR devrait s'appeler le carré de ROTAS, s'il a été conçu dans une langue qui se lit de droite à gauche. L'inversion évoque le Pendu du Tarot et une connaissance de la loi d'inversion des pôles.


L'art du SATOR est de placer le subtil en bas et l'épais en haut. SATOR maîtrise la charrue, I'Œuvre et la roue, qui signifie le Feu secret. Il réalise son rêve dans le plan matériel.

LE TEMPLE SATOR

Dans le carré de Sator, les consonnes structurent l'espace, par les diagonales majeures et les points clés qu'elles occupent, à chaque rangée. C'est l'ossature du nom divin. Les voyelles en sont l'âme. Celles-ci se développent en des diagonales secondaires, rythmant l'édifice.

Ce dernier a pour équivalent la triple enceinte et comme développement tridimensionnel, la pyramide à degrés. SRN ou RPN en constituent les arêtes, alors que la lettre T en ouvre les portes. Ces quatre portes cardinales renvoient aux quatre voies qui attendent celui qui se destine à l'initiation ou à l'alchimie.


Voie de droite, voie de gauche, passage par la mort et voie royale que peu d'élus empruntent.


Le premier degré apparaît dans les Rotas du Sator, tracées par l'araire Arepo. C'est ainsi que les prêtres creusaient le premier sillon, délimitant l'enceinte ou que l'étudiant ouvre la Terre, pour débuter son oeuvre.


La deuxième enceinte est justement celle de l'Œuvre, encore incomplète, encore inachevée REP et PER participent du mot Opera, et à I'Œuvre sans la réaliser. Ici, la materia est prête à être fécondée.


Le Feu secret se tient au troisième étage, dans le N. Vibratoirement ce N correspond au feu. Dans certains carrés de Sator, ce N est dessiné à l'envers, ce qui augmente sa capacité opérative et en fait le feu secret de l'opérateur, le mystère de sa réussite.


Le carré de Sator n'est-il qu'un jeu futile? Au-delà de recherches purement arithmétiques, les carrés magiques de nombres ont une signification métaphysique. De même, le carré de Sator devient la structure réduite du temple, et pour l'adepte, un athanor et une image simplifiée de la réalisation de I'Œuvre.

Bon, le “ mystère ” reste épais, et on peut le densifier à loisir en ajoutant avec G.C Mouny (Rennes-le-Château, un autre regard sur l’Enigme, cf nos chroniques)

-          que cette pierre mystérieuse aurait été partagée en deux, et que la seconde pièce aurait été introduite à Alet-les-Bains, près de RLC.

-          Que les villes de Jarnac-Champagne, Montrevel, Gisors, Stenay  et RLC possèdent non seulement une représentation du carré magique, mais furent toutes le siège d’une commanderie du Prieuré de Sion.

LA FIN DE LA DYNASTIE MEROVINGIENNE ?

Les affaires précédentes ne sont que des hors-d’œuvre, somme toute mineurs. La problématique mérovingienne est certainement le cœur du mythe et la connexion la plus évidente avec l’affaire de Rennes-le-Château. Si l’on résume à traits grossiers, au risque de déformer, l’abbé Saunière aurait découvert :

-          des parchemins faisant état d’une survivance occulte de la dynastie mérovingienne, par l’intermédiaire du fils de Dagobert II, Sigebert, qui se serait réfugié dans le Razès.

-          voire même la tombe de l’héritier sacré.

Sur ces allégations -jamais confirmées- s’est développée une mythologie extraordinaire, faisant remonter l’origine de la dynastie mérovingienne aux extra-terrestres (cf supra), ou plus fort encore, au Christ lui-même. La “ belle histoire ” est bien connue et a été largement popularisée par l’ouvrage de Lincoln & co, “ L’Enigme Sacrée ” : le Christ n’est pas mort sur la croix ; il a épousé Marie-Madelaine dont il a eu des enfants ; laquelle Marie-Madelaine s’est réfugiée en France…… etc. Cette filiation occulto-divine s’inscrit par ailleurs dans le cadre d’une mystérieuse société secrète, le Prieuré de Sion, qui serait à l’origine de l’Ordre des Templiers. Le Prieuré serait toujours actif de nos jours [9] , sous la houlette de Pierre Plantard de Saint Clair, prétendant caché au trône de France. Ajoutons encore que d’étranges documents, déposés à la Bibliothèque nationale (Dossiers Secrets, Le Serpent Rouge, Généalogie des rois mérovingiens) sous diverses signatures dont celle d’Henri Lobineau, attesteraient de cette fabuleuse descendance. Ce n’est pas ici le lieu de montrer que le dit Prieuré n’a aucune existence historique, ni que ces fameux documents sont des faux. D’autres l’ont fait mieux que moi, et notamment Gérard de Sède qui dans un ouvrage de 1988 racontera comment “ il s’est fait avoir ” par une inquiétante équipe de mystagogues (cf nos Chroniques, infra).

Revenons donc à l’histoire et à nos mérovingiens de Stenay. Un numéro spécial de “ Etudes Mérovingiennes ”, bulletin du Cercle Saint Dagobert II (juin 2000) nous explique ainsi la fin de la dynastie :

Dagobert II est né vers 650 et succède au trône  d'Austrasie à son père défunt, encore enfant, selon la coutume à cette époque. Le Maire du Palais (sorte de Premier ministre tout puissant), GRIMOALD imagina une ruse pour éloigner l'enfant en exil en Irlande, en espérant que le jeune roi serait oublié. Mais, DAGOBERT fut remarqué par le futur évêque d'YORK, WILFRID. Ce dernier éduqua et instruisit le jeune prince. Informés par WILFRID, les seigneurs d'AUSTRASIE réclamèrent le retour du roi. DAGOBERT Il, de retour dans ses Etats qui avaient été ravagées par les guerres et les factions rivales au cours de son exil, rétablit la paix et la prospérité. Il fit beaucoup de fondations de monastères et d'églises.

Cependant, sa réussite suscita la jalousie d'EBROIN, Maire du Palais de NEUSTRIE et de BURGONDIE. Ayant appris le séjour de DAGOBERT, courant décembre 679 à STENAY, un complot visant à assassiner le roi fut organisé et réussit près de la FONTAINE D'ARPHAYS, aujourd'hui FONTAINE SAINT DAGOBERT.

Le corps du roi fut ramené à CHARMOIS, puis enseveli dans la basilique St Rémi de Stenay. Son fils SIGEBERT IV, héritier du trône, disparut en même temps que son père ou, selon la légende, fut exilé dans le RAZES, où il aurait fait souche.

La mémoire du pieu Dagobert fut longtemps conservée par le peuple, si bien que le roi carolingien CHARLES Il «le CHAUVE», a pris une part personnelle dans l'hommage rendu au roi martyr.

Il réunit en l'an 872, le 10 septembre, un concile à DOUZY (Ardennes) qui sous l'égide d'HINCMAR, archevêque de REIMS, béatifia DAGOBERT II.

A cette même date, fut érigée une nouvelle basilique à Stenay, plus tard fut adjoint un prieuré à la chapelle. Un pèlerinage perdura jusqu'à la Révolution. Il rassemblait près de 36 paroisses des environs.

en valeur le portail entreposé en plusieurs

Force est donc de constater que la “ survivance ” mérovingienne, dans le Razès ou ailleurs du reste, est du domaine de la légende. Mais comme me le dit régulièrement une de mes relations dans le milieu “ ésotérico-journalistique ”, ce n’est pas parce que ce n’est pas prouvé que c’est faux ! ”.

Dont acte.



[1] Guide des Chemins du Roi Dagobert, par Jean-Pierre Bousigues, Editions du Cercle Saint-Dagobert, 3 place Poincarré, 55700 Stenay, 2001.

[2] Il s’agissait en fait du Marquis Philippe de Chérisey, comparse de Pierre Plantard.

[3] Voir par exemple “ Les Livres Maudits ” dans la même collection J’ai Lu (Aventure Mystérieuse)

[4] En fait cette découverte a été faite en 1965 par Laplante, architecte local. Le portail de l’église a été démonté en 1972 sous la supervision de l’abbé Vigneron pour être préservé dans un lieu sûr.

[5] Ce document est un “ faux ” fabriqué par l’équipe de Pierre Plantard pour accréditer la descendance mérovingienne de ce dernier ; cf infra.

[6] La commune de Stenay a tenu à lui rendre hommage en baptisant de son nom en 1983 la petite place qui termine la rue de la Citadelle devant l'Hôtel du Gouverneur devenu Musée Municipal.

[7] Le Livre d’Histoire, Paris 1998 (Monographies des Villes et Villages de France).

[8] Actualité de l’Histoire Mystérieuse, HS 22 ©

[9] Il est des personnages qui, même mort, continuent de faire parler d'eux. C'est le cas de Pierre Plantard. Depuis quelques semaines, certains individus n'hésitent pas à mettre en doute son décès.

Pour certains, c'est un coup monté par "Les Webmasters", voir directement par moi même, pour d'autre, parait-il, Pierre Plantard est réellement mort, mais ressuscité !!! On nage en plein délire !

Je n'ai qu'un seule rectificatif à faire par rapport à ce que j'ai annoncé précédemment . Pierre Plantard n'est pas décédé le 13 juin dernier, mais le 3 février 2000.

Ayant fait la demande de son acte de décès auprès de la Mairie de la Commune de son décès, je vous confirme donc sa mort le 3 février 2000 à onze heures dix minutes.

Je ne peux hélas pas diffuser cet acte de décès sur le Site, la Loi Française interdisant la publication de ce genre de document. Ils sont publics, accessibles à tous, mais non diffusables.

Alors cessons les fausses rumeurs ridicules qui ne font pas avancer l'étude du dossier pour autant !

(JP Pourtal, extrait de Rennes-le-Chateau.org)