Nous vous invitons maintenant à un autre voyage, cette fois au pays de l’abbé Saunière, en compagnie d’une joyeuse équipe de l’ODS. Ce voyage date de l’été 2001.
Rêves de Razès / Philippe Marlin ©
La Vierge Noire de NDdM

Philippe Marlin ©

Mercredi 1er Août 2001

L’odésien Franck Buleux me retrouve à Carcassonne pour la partie Saunièrisante de mon périple. Franck est un adhérent relativement récent, très versé dans les Arcanes, et dont la compagnie s’avérera être assurément un plus ; il souffre en effet d’une maladie fort sympathique, la « draguite aiguë », et avec lui, le contact sera rapidement établi avec les jeunes beautés locales.......

La papamobile de l’ODS fait une première escale à Notre-Dame de Marceille, une église retirée dans les environs de Limoux. Une église qui a été rachetée en 1892 par Monseigneur Billard, alors Evêque de Carcassonne, et sous laquelle de discrètes fouilles ont été opérées amenant à découvrir une chapelle souterraine On sait que Billard était le protecteur de Bérenger Saunière, et on raconte que ce dernier venait régulièrement visiter son supérieur ici.......... Cette église est par ailleurs évoquée dans la Bible du Mythe, « La Vraie Langue Celtique ou le Cromlech de Rennes-les-Bains » de Henri Boudet, confrère de Bérenger Saunière. Elle est également citée dans « Le Mystère des Cathédrales » de Fulcanelli. On lit dans « La Révélation des Templiers » de Picknett et Prince (éditions du Rocher, 1999) : « Peu avant d’être emporté par le cancer en 1995, Jos Bertaulet affirmait avoir décodé l’œuvre étrange de Boudet…… Elle révélait, selon lui, que cette chapelle souterraine abritait un reliquaire contenant la tête d’un Roi Sacré. Il affirma, en outre, que Boudet rattachait cette salle aux légendes du Saint Graal…… »

Nous n’aurons pas trouvé les souterrains (murés semble-t-il suite à plusieurs accidents), mais admiré une remarquable vierge noire très solidement protégée par une lourde grille.

Second stop à Rennes-les-Bains, une riante petite station thermale, encastrée dans les rochers et traversée par la Sals. Il règne ici une atmosphère dense, conséquence à la fois du poids d’un passé très riche et d’un environnement naturel généreux......... L’or et l’eau, le liquide et  le métal, se fondent au végétal dans une luxuriante harmonie sous le regard immobile des vieilles pierres. Les noms des lieux, des cours d’eau ou des sites forment une symphonie fantastique qui résonne doucement aux oreilles du passant : « la rivière des couleurs », « les sources de la Madeleine », « la source du diable », « les roches tremblantes », « la tête du Sauveur », « la fontaine des amours »......  La liste complète remplirait plusieurs pages. [1]

Petite visite bien sûr à l’église pour rendre un hommage mérité au brave Henri Boudet, ce prêtre érudit, linguiste, historien et certainement ésotérisant. Son livre énigmatique sent bon le gag lorsqu’on nous explique que les langues anciennes dérivent.... de l’anglais moderne. Mais il est aussi une fantastique machine à rêver si on le considère comme un document codé, susceptible de nous mettre sur la piste d’un fabuleux trésor. Personne évidemment, et malgré ce qui précède sur Notre-Dame de Marceille, n’a jamais rien décodé, et fort heureusement......... Le moteur d’imaginaire reste intact et donnera lieu encore à des tonnes d’études savantes pour le plus grand bonheur des saunièrologues avisés. Précisons en effet que d’après les tenants de « la belle histoire », Boudet aurait eu connaissance du « mystère » et aurait été l’inspirateur des travaux et des recherches de BS. Pour certains, de surcroît, il en aurait été le pourvoyeur de fonds.

Arrivée à Couiza où nous nous arrêtons chez Solaroma, l’entreprise de notre ami Fabrice Bardeau. Fabrice est un compagnon « murmurien » qui consacre toute sa passion à l’alchimie opérative. Parisien d’origine, il s’est exilé dans ce petit coin perdu de l’Aude où il gère une affaire « spagirique », distillant les plantes les plus diverses pour fabriquer des huiles essentielles et autres produits de beauté naturels.  Mais l’essentiel de sa recherche est ailleurs......

Retour à Rennes-les-Bains où Fabrice a retenu une table à l’auberge locale pour le déjeuner. La chaleur est écrasante et nous nous précipitons avec impatience sur une carafe de rosé local...... bien glacé. Fabrice a 69 ans et respire une étonnante jeunesse. Son secret : deux ou trois gouttes d’huile essentielle de lavande chaque matin (cf supra) ; Fabrice précise du reste que ses produits sont tout ce qu’il y a de plus « officiels » et font l’objet d’une homologation en bonne et due forme. Le sujet de la médecine parallèle branche immédiatement mon compère de route, et Franck se livre à une comparaison savante des mérites respectifs de l’une et l’autre plantes d’un exotisme torride. Fabrice le renseigne patiemment, ses expéditions régulières en Chine, aux Indes ou à Cuba lui permettant de maîtriser parfaitement les pharmacopées les plus rares. Compte-tenu des penchants manifestes de Franck, la conversation s’orientera tout naturellement vers les potions qui restaurent la vigueur nécessaire aux exercices libidiques. Inutile de lui offrir « la Magie Sexuelle et Amoureuse » de Marc-Louis Questin, il possède manifestement le sujet.

Rennes-le-Château........

Fabrice nous décrit avec humour la faune qui défile dans la région, à la recherche de la révélation ultime. Et de brocarder ensemble « ceux qui savent tout sur le sujet »....... Pour lui, la terre et les rivières regorgent de métal jaune, et il ne serait pas étonnant que nos braves curés aient découvert un gisement aurifère dans l’une de ces myriades de grottes qui truffent la région.

Nous repassons rapidement à Couiza faire le plein de produits issus de « la pharmacie du Bon Dieu ». Je resterai discret sur les acquisitions de Franck.

La véranda de la Villa Béthanie

La route en lacets qui nous mène à la capitale mythique de l’histoire de France est vite parcourue et nous entrons dans le domaine des rêves les plus fous. Ma première et dernière visite à Rennes-le-Château remonte à 1973, à une époque où je travaillais au soleil de Lavelanet et à l’ombre de Montségur. Le lieu était déjà très prisé par les creuseurs de trous et par les adeptes du détecteur de métaux, mais il n’avait pas encore la dimension de « tourisme sacré » qu’on lui connaît aujourd’hui. Saunière voulait paraît-il faire de sa colline inspirée un lieu de pèlerinages somptueux, à l’instar de ceux de Lourdes. Force est de constater qu’il a réussi, mais peut-être pour des raisons fort différentes de celles de ses ambitions grandioses.

Car il y a du tourisme à RLC, un tourisme international, curieux, naïf ou érudit et peu économe en pellicules photographiques. Le domaine de l’abbé, après être passé pendant des décades entre les mains de l’inénarrable Henri Buthion, puis pour peu de temps sous la houlette d’une société étrangère, appartient aujourd’hui à la commune de RLC. Quant on sait que la commune possède 30 habitants, on comprend qu’elle a bénéficié de subsides départementaux et régionaux pour financer l’acquisition. Un vaste programme d’entretien et de rénovation est à l’étude.

Et en avant.......

Je l’ai déjà écrit, cette affaire de RLC me fascine depuis de nombreuses années. Moins pour son « Mystère » que pour le Mythe qu’elle a engendré. Je fais volontiers partie de l’école des débunkers, voyant essentiellement derrière cette « belle histoire » une banale affaire de trafics en tous genres, susceptibles d’expliquer la genèse de la richesse du curé aux milliards. Mais ce qui est extraordinaire, c’est la façon par laquelle un fait divers qui aurait pu rester somme toute banal s’est transformé en une vaste saga mythologique. Car le terrain est miné ici, parsemé de faux parchemins, de manuscrits fabriqués de toutes pièces, le tout généreusement enrichi par des délires ésotérico-mystiques en tous genres.

Nous prenons les billets au presbytère où Franck tombe d’emblée amoureux d’une sculpturale Carole qui nous fera faire le tour des lieux. Le presbytère est transformé en un petit musée dans lequel on peut admirer les originaux de la dalle aux Chevaliers (représentant pour certains la fuite du dernier des mérovingiens, parti de Stenay [2] après l’assassinat de son père, Dagobert II, pour un exil dans le Razès !), ce qu’il reste de la dalle de la tombe de la dame de Blanchefort (un document crypté par l’abbé Bigou, confesseur de la dite dame et l’un des prédécesseurs de BS) et le fameux pilier wisigothique où notre héros aurait découvert de mystérieux documents. Une petite mention également pour les oeufs de dinosaures que l’on trouve semble t-il un peu partout dans la région.

subjugué par la grimace d'Asmodée......

Puis c’est au tour de la villa Béthanie qui, après avoir été transformée en hôtel, a été « reconstituée » en Saunière’s Home. Détail intéressant, on peut contempler en haut de l’escalier un tableau qui n’a rien de religieux, une scène printanière avec de jeunes nymphettes. Saunière y avait fait peindre en « filigrane » le portrait du diable Asmodée que l’on retrouvera dans l’église.

La chaleur est insupportable sur le belvédère, mais le spectacle est grandiose : le Bugarach et sa base (secrète) de soucoupes volantes, le Mont Cardou et son tombeau du Christ (les tombeaux du Christ sont légion dans la région !).

Petite pause sur la terrasse de la tour Magdala où Carole, avec tact et humour, nous résume les différentes hypothèses du dossier. Franck la mange des yeux. Elle nous raconte l’histoire de la dynastie mérovingienne oubliée, celle de Marie-Madeleine en exil dans la région avec l’enfant qu’elle a eu du Christ. Elle nous narre également l’affaire des fouilles en projet, à l’initiative d’une fondation américaine qui a passé le site au sonar. Un coffret a été détecté sous la tour (il ne contient pas de métal, mais manifestement des manuscrits) ; une crypte a également été localisée sous l’église, avec deux tombeaux. Les travaux devraient avoir lieu après la saison touristique. La fondation s’est adjointe les services d’une société en communication qui serait dans l’orbite du Vatican. Et d’après un article récent du Figaro Magazine, elle est dirigée par une sexy Serena qui aurait déclaré : « je suis là pour détruire tous les documents qui pourraient remettre en cause l’Eglise ». Gag ? Non, interviewé il y a quelques jours sur le site de Jean-Philippe Pourtal, le maire de RLC a confirmé les propos, mais précisé qu’ils avaient été tenus après un repas bien arrosé ! Ouf !!!!!

C’est ensuite la visite de l’église. Je ne reprendrai pas les commentaires qui figurent dans les centaines de livres qui fleurissent sur le sujet. Juste quelques impressions :

- la décoration donne une impression générale de kitsch flamboyant : Asmodée est horriblement coloré, et la décoration d’ensemble nage dans un doucereux cocktail de jaune, saumon, bleu et jaune......

- Saunière était un sacré provocateur ; outre son diable grimaçant, la Vierge et Joseph qui se font face à face des deux côtés de l’autel, chacun avec un enfant Jésus entre les bras, interpellent pour le moins le visiteur.

- quant aux symboles ésotériques qui fourmilleraient un peu partout, je suis fortement partagé.... C’est vrai que la Rose- Croix est présente (deux fois) sur chaque tableau du chemin de croix ; c’est vrai aussi que les allusions maçonniques sont légion : sur le tableau VIII par exemple où l’on voit la veuve, et un enfant avec un pantalon écossais........ Mais il ne faut pas oublier que toute cette décoration est l’œuvre de Giscard, un artisan-maçon de Toulouse.

En fait, ce qui me trouble dans l’affaire de RLC, c’est son aspect codage, que ce soit au sujet de l’église, du jardin (les travaux d’Alain Ferral sur le sujet montrent que le jardin et le cimetière représentent l’église inversée) ou encore des écrits de Boudet. Pourquoi se torturer ainsi la cervelle ? Pour cacher quoi ? Car de deux choses l’une. Nos compères ont découvert un redoutable secret qu’il ne faut absolument pas divulguer : dans ce cas, inutile de se fatiguer. Ou alors se secret doit être transmis en mains sûres : mais il y a des moyens plus simples que cet invraisemblable jeu de piste : notaire, évêché, Vatican, Grand Rabin de France (si découverte de l’Arche d’Alliance !) ou Grand Maître de la société secrète à laquelle ils auraient selon certaines écoles appartenu ........... Du reste, force est de constater que nos deux curés ont échoué dans la démarche qu’on leur prête volontiers...... Personne n’a rien trouvé !

Petit détour en sortant sur le calvaire au dos duquel figurent ces inscriptions : « Christus AOMPS defendit ». Les mystagogues ont bien évidemment immédiatement décrypté AOMPS comme « Ancien Ordre Mystique du Prieuré de Sion », allusion à cette hypothétique société secrète qui régenterait de cours de l’histoire. En fait une création astucieuse du fameux Pierre Plantard pour légitimer ses prétentions à la descendance mérovingienne ! D’après les spécialistes des écrits religieux, cette phrase ne signifie rien d’autre que : « Christus Ab Omni Malo Populum Suum Defendit », soit : « le Christ protège de tout mal son peuple »........

Complètement déshydratés, nous nous réfugions à la Table de l’Abbé, bistrot tenu par Jean-Luc Robin, restaurateur à Espéraza. Un grand jardin contigu au presbytère où sont organisées, chaque week-end, des conférences sur notre énigme favorite. On y retrouvera les écrivains Jean Blum, Claude St-Clair (la région de Rennes dans l’œuvre de Jules Verne), l’historien Jean Lautier (les Cathares dans l’Aude), le maire de RLC qui est manifestement un passionné, JL Robin himself qui ne fait pas que de la cuisine, ou encore les conférenciers de l’association « Terre de Redhae » (le point sur les mystères de RLC)…… On pourra y participer également au « méchoui des anciens chercheurs  » !!!

Franck fait causette à la serveuse.
Nous traversons le village. Le restaurant « les Pommes Bleues » est fermé, il ne fonctionne manifestement que le week-end. Fermé également l’Atelier d’Art d’Alain Ferral. On raconte que très « fatigué », il a quitté les lieux. Dommage, j’aurais bien aimé voir sa fameuse maquette représentant l’église et « l’église inversée »....... Arrêt obligatoire à « l’Atelier Empreinte », la librairie ésotérique du site, tenue par la sympathique et compétente Sonia Moreu. La boutique dégorge bien évidemment des publications les plus variées sur le sujet et sur les thèmes connexes (templiers, cathares, histoire régionale....). « Le Chant de Montségur » de nos amis Ward-Miller figure en bonne place. Nous faisons provision de cartes postales, complétons nos bibliothèques respectives sur l’affaire. J’achète également pour le Cardinal « les Archives du Prieuré de Sion », une remarquable compilation en trois livrets des vrais-faux documents concoctés par Pierre Plantard et son Marquis de Cherisey.

…………….

Retour à Carcassonne. Je regagne l’Hôtel Ibis, Petite Loge Provisoire. Il est minuit et demi. Un message m’attend : « rappeler Jean-Pierre Croquet »........ Miracle de l’ODS. Jean-Pierre est un ami de Marc Lalvée, notre odésien hutinologue. Jean-Pierre est en vacances à Alet-les-Bains, et ayant appris par Marc que nous étions dans la région, il souhaite se joindre à nos aventures saunièrologiques....... 

Je m’endors paisiblement, subjugué par la grimace d’Asmodée......

 

Mercredi 2 août 2001

Franck m’attend à l’hôtel, guilleret malgré  une nuit passée en boîte...... et ravi, car à côté de l’Ibis, il a repéré une école de coiffure avec d’affriolantes élèves....... Petite marche en ville et rendez-vous à la gare de Carcassonne pour récupérer le professeur Yves Lignon et son épouse qui arrivent de Toulouse. Yves est natif de Limoux  et connaît parfaitement le sujet qui nous unit aujourd’hui. Les anecdotes fusent dans la papamobile........

Yves L, Jean-Pierre C., Marie-Christine L., Franck.B

Souvenirs de ses excursions en bicyclette sur la route de RLC (entre nous, il faut de bons mollets pour gravir la colline magique !), anecdotes sur ses rencontres avec les protagonistes contemporains de l’affaire. Nous apprendrons ainsi que Gérard de Sède n’aime pas l’eau ferrugineuse, et que............. il n’y a personne dans la tombe de Saunière. Le pendule ne vibre pas me précise Madame Lignon.

Yves fait partie de l’école des débunkers, et je reprends ici ses propos passés sur la liste odésienne, Serpent_Rouge [3] :

Bien que n'ayant pas l'importance de la bataille de Bouvines, l'affaire Saunière peut être considérée comme un fait historique donc étudiée par la méthode scientifique (soit avec rationalité). Entre autres choses, la méthodologie scientifique confronte des hypothèses à l'information disponible. Il faut cependant s'entendre sur la bonne manière de tester ainsi des hypothèses. C. Brunon [4] , ceci écrit sans agressivité, ne semble pas la connaître (*) Basé sur les réflexions d'Occam (1297-1329), le test consiste à se demander si l'hypothèse la plus triviale ( l'hypothèse nulle des statisticiens, je me permets de rappeler ici que la statistique théorique et appliquée est mon métier) peut être rejetée en l'état de l'information. En cas de rejet seulement on s'intéresse aux hypothèses alternatives. Répétons : -)) Etudier une hypothèse alternative sans avoir rejeté l'hypothèse nulle n'est pas rationnel, valoriser les arguments qui semblent favoriser l'alternative aux dépens de la nulle ne l'est par conséquent pas non plus. Avant de se demander si l'on doit prendre son parapluie, il faut d'abord s'assurer qu'il risque de pleuvoir. Dans le cas Saunière l'hypothèse nulle, qui est celle de divers trafics (pas seulement de messes), ne peut être rejetée. Je donnerai l'ensemble de mes arguments dans le livre que je suis en train d'écrire mais en voici au moins un des plus légers : quand il y a un peu plus de quarante ans (**) mes promenades cyclistes d'adolescent m'amenaient au pied de Béthanie, les habitants de Rennes me parlaient du trésor comme on parle de la sardine sur le Vieux Port. A partir du moment ou l'hypothèse nulle ne peut être rejetée, s'intéresser à l'hypothèse alternative ne relève plus de la rationalité mais du rêve. Et le rêve est proche du Mythe ou plutôt des deux Mythes successifs. Celui du trésor ayant fait chou blanc (un peu avant 1970 on disait aussi à R le C : "Avec tout ce qu'il a décrypté, comment se fait-il que G de Sède ne l'ait pas trouvé lui-même le trésor "), celui du Secret lui a succédé. Sur le "pourquoi le Mythe ?", ce Mythe effectivement Agglutinant, je ne saurai dire que des banalités : un statisticien trouve l'information mais ne l'interprète pas (quand je travaille avec des biologistes, des psychologues, des géographes.. . ce sont eux et non moi qui donnent un sens aux résultats que j'obtiens). Donc je débunke quoique, Phil, cette typologie me semble un peu grossière, j'y reviens aussi dans mon bouquin . En la matière le livre-princeps est évidemment le premier paru celui de Descadeillas (même Poussin passe a la moulinette) "Mythologie du Trésor de Rennes". Il a été réédité en 1991 (superbe présentation) par un de mes anciens étudiants Patrick Collot (qui a également beaucoup fait pour Joseph Delteil) à Carcassonne et est peut-être introuvable ( ISBN : 2 .9. 03518.08.4). A défaut les éditions Loubatières doivent toujours tenir en magasin " R le C autopsie d'un mythe" de JJ Bedu mais le plus accessible est sans doute "R le C Le mystérieux trésor de l'abbe S " de G. Mathelie -Guinlet ( Auberon, Bordeaux,1997) cet auteur ayant tout de même la curieuse particularité de s'auto-de-debunker par moments.(***) Pour finir entendons nous bien : je n'ai rien contre qui adhère à un Mythe (et j’éprouve corrélativement beaucoup de sympathie pour G de Sède qui un jour chez moi à l'occasion de la parution du roman de JM Thibaux...mais c'est une autre histoire) à condition qu'on ne confonde pas cette adhésion avec la conclusion d'une démarche rationnelle. Torchons et serviettes quoi ..  et rabâchons : entre "les trois mousquetaires" et " les mémoires de d'Artagnan", il ne peut y avoir ni jugement de valeur, ni confusion.
 (*) Einstein n'a pas contredit Newton , on ne sait pas si la mécanique quantique contredit ou non la relativité, les théories ne sont pas des représentations de la réalité mais des modélisations, Marie Denarnaud n'a pas brûlé des anciens francs ( il lui aurait fallu pour cela vivre jusqu'en 1960) mais (et d'ailleurs seulement peut-être) des billet retirés de la circulation etc... Bon, je ne suis pas un instit qui dort avec son Bic rouge.

(**) Eh oui j'ai la chance d'être du coin, j'ai aussi celle d'avoir eu pour collaborateur, pendant les dix années précèdent sa mort, le Docteur Malacan, celui qui possédait un crâne portant une blessure.

(***) Mais aussi un décoiffant passage sur la réalité économique des dépenses de BS.

Et d’échanger sur la pauvreté des recherches « universitaires » sur cette affaire. L’étude du clergé audois à la fin du XIX ème siècle reste à écrire ; tout comme celle de l’occultisme languedocien, thème pour lequel de Sède donne dans ses ouvrages quelques orientations de travail intéressantes.

Nous traversons Montazels, le village natal de BS, puis escale pour déjeuner au restaurant des Deux Musées à Espéraza, tenu par Jean-Luc Robin déjà cité. Jean-Pierre Croquet et sa petite famille nous retrouvent, et la glace est comme à l’habitude instantanément rompue. Jean-Pierre est professeur de français à Lille, passionné d’ésotérisme et de littérature populaire, notamment policière. Nos deux comparses se découvrent rapidement un point commun de taille, leur passion dévorante pour Sherlok Holmes...... Ils appartiennent bien sûr tous les deux à la même société « discrète » chargée de perpétuer l’œuvre du Maître.
Franck est étonnamment absent ; la nuit a été courte et la serveuse ne semble pas obéir à ses canons libidiques...... Aparté de Yves Lignon avec le restaurateur-conférencier ; les projets de causeries saunièrisantes fusent.
Retour à RLC. Franck ouvre une paupière, Carole est en effet toujours au poste. Yves est enchanté de retrouver Asmodée en bon état. Des vandales lui ont en effet coupé la tête qu’il a fallu restaurer. On a beaucoup écrit sur ce diablotin coloré, et notamment sur le caractère saugrenu (et donc mystérieux) de sa présence dans l’église ; Asmodée est en quelque sorte la première dimension visuelle du Mythe. Quelques jours plus tard, au cours d’un autre périple dédié aux chapelles alchimiques de Provence (cf infra), je constaterai avec surprise sa présence dans la petite église de Roquebillière (arrière-pays niçois, sur la Vésubie). Notre petit copain est tout aussi bronzé que son jumeau de RLC, mais ici il est couché sur le flanc, terrassé par Saint-Michel. Et comme me le fera remarquer Mado, une guide passionaria, « il est beaucoup plus ancien que celui de BS »....... Comme quoi les choses les plus étonnantes sont parfois banales !
Petit tour dans le cimetière, après avoir franchi la porte d’entrée décorée d’un crâne. Un crâne soit-disant doté de 22 dents (Jean-Pierre n’en comptera que 20 !). Car 22 est le symbole chiffré des lieux ; deux fois 11 marches pour accéder à la terrasse-belvédère, Saunière est mort un 22 janvier, la fête de Marie-Madeleine est le 22 juillet.... etc.......
Rafraîchissement au Bistrot de l’Abbé ; Yves nous raconte avec passion plusieurs de ses recherches en matière de parapsychologie et notamment les cas « où l’on ne sait pas »...... Son épouse évoque avec émotion leur croisière « Mystères » durant laquelle ils ont fait la connaissance de Paco Rabane. Un grand Monsieur, fort honnête puisqu’il a fait amende honorable suite à l’échec de sa prédiction, se retirant discrètement de la scène après avoir fait pilonner son dernier ouvrage prophétique.

Nouvelle escale à l’Atelier Empreinte, puis retour sur Alet et Carcassonne où nous abandonnons provisoirement nos amis. Ce type de rencontre est à l’évidence à renouveler !

Je reste avec Franck pour un dernier dîner en commun dans la cité. Cette merveilleuse symphonie de vieilles pierres abriterait, selon les uns le trésor d’Alaric.... voire même celui du Temple de Jérusalem. Elle est aujourd’hui envahie par les marchands....... du Temple. Les restaurants s’écrasent les uns sur les autres, les boutiques  dégorgent de souvenirs médiévaux en carton-pâte, les musées de l’Inquisition, de la torture ou des cathares poussent comme des champignons. C’est ici le head-office de Philippe Contal, responsable sur Internet du serveur Beaucéant, et animateur d’un Catharama où vous découvrirez tout ce qu’il faut savoir sur les Parfaits........ grâce aux techniques multi-média !

Nous refaisons le monde autour d’une table de tapas, avant d’attaquer un solide cassoulet. La conversation zappe de la franc-maçonnerie aux dernières techniques en vogue dans le domaine de la libidique du Nouvel Eon.

 Vendredi 3 août 2001

Mon compagnon de route rentre sur Paris, certainement après une petite escale à l’école de coiffure.... La limousine de l’ODS reprend bravement son chemin.

Première escale à Arques, à quelques encablures de RLC. Arques possède un magnifique château cathare, datant du VII ème siècle et fort agréable à visiter. Pas de chance en revanche, l’église est fermée et je ne pourrai satisfaire la commande de Christophe Villa-Melé, autre ami saunièrisant, à savoir photographier le tableau de Jésus et de la petite poire.........  Selon les travaux d’André Douzet [5] , la clef du Mystère du Razès est peut-être ici : sur le tableau, on voit une femme tendre à l’enfant Jésus une poire ; celle-ci est d’une espèce rare, une poire Marie-Madeleine...... Or cette poire figure sur le blason des seigneurs de Périllos, un petit village abandonné situé près de Opoul (cf infra). Et le AD aurait mis la main sur une maquette géographique commandée par Saunière représentant les lieux saints, mais avec une grande liberté topographique. Le relief en effet correspond à la région de Périllos. C’est donc là qu’il faut chercher..... .
Arques, c’est aussi le musée de Déodat Roché, le pape du catharisme, bien connu pour ses travaux érudits diffusés notamment par le revue « Etudes Cathares ». Le musée est installé dans sa maison, derrière l’église.
Arques, enfin, c’est le mythique tombeau des Pontils, rendu célèbre par le tableau de Nicolas Poussin « les Bergers d’Arcadie ». Situé dans la commune limitrophe de Peyrolles, il n’est plus aujourd’hui que néant, détruit par les propriétaires du terrain lassés des dégâts occasionnés pas les chercheurs de trésor. Dans la création du Mythe de RLC, ce tombeau (ou ex-tombeau !) occupe une place de choix. Le tableau de référence fut exécuté par Poussin en 1638/39, sur la commande du futur pape Clément IX. Quatre points:
- il représente un paysage qui serait celui du Razès.
- il porte l’inscription « Et in Arcadia Ego » que l’on retrouverait sur le tombeau de la Dame de Hautpoul (un tombeau dont les inscriptions ont cependant été effacées par BS !).
- d’après une lettre de l’abbé Fouquet à son frère l’Intendant, Poussin aurait percé un ténébreux mystère. 

- enfin, lors de sa visite à Paris (1892), consécutive à la découverte de sulfureux et hypothétiques parchemins, BS aurait fait l’acquisition d’une copie de ce tableau au Louvre. Les débunkers préciseront que ce voyage est de l’ordre de la spéculation, et que cet achat n’a laissé aucune trace dans les registres du musée.....

Le Château d'Arques

Ceci dit, lorsque l’on sait que le tombeau (le vrai) fut construit par la famille Galibert en 1903, la question n’est pas tellement « quelle fut la source de l’inspiration de Poussin ? », mais plutôt « pour quelles raisons Lawrence Galibert a t-il été amené à copier un tombeau figurant sur un tableau du XVII ème siècle ? ». Par ailleurs, une intéressante étude publiée dans le numéro 7 de la revue « Terre de Redhae » sous la signature de Christian Aumard se livre à une fort amusante critique des décryptages des monts figurant sur le paysage, tels qu’ils ont été effectués par les saunièrologues : de Sède (Bézil Grand & Roc de Blanchefort), Paoli (les mamelons de Rennes-les-Bains), Descadeillas (rocher de las Tostonas & roc de Quinautier), Franck Marie (Pic de Lavaldieu & château du Bézu) etc..........  Et de conclure qu’il existe de très nombreux lieux sur la planète qui pourraient également faire l’affaire.
Tout cela a un délicieux parfum mystagogique, d’autant plus que cette pièce du puzzle est reprise, avec une sauce ésotérique bien épicée, dans l’un des faux documents du Pieuré de Sion, l’inénarrable « Serpent Rouge » : j’étais comme les bergers du célèbre peintre Poussin, perplexe devant l’énigme : Et in Arcadia ego..... La voix du sang allait-elle me rendre l’image d’un passé ancestral. Oui, l’éclair du génie traversa ma pensée. Je revoyais, je comprenais ! Je savais maintenant ce secret fabuleux. Et merveille, lors des sauts des quatre cavaliers, les sabots d’un cheval avaient laissé quatre empreintes sur la pierre, voilà le signe que Delacroix avait donné dans l’un de ses trois tableaux de la chapelle des Anges. Voilà la septième sentence qu’une main avait tracée : retire moi de la boue, que je n’y reste pas enfoncé. Deux fois IS, embaumeuse et embaumée, vase miracle de l’éternelle Dame Blanche des Légendes.
Pour corser le tout, encore faut-il préciser que le fameux méridien zéro ou méridien magique passe dans les parages....... Alors ?

Petite escale sportive à Peyrpertuse, l’une des fameuses « citadelles du vertige » de la région cathare. Celle-ci est particulièrement étonnante, dans la mesure où elle résulte d’une véritable fusion entre la poche et la pierre de construction. Je déjeune rapidement à Cucugnan, au restaurant du curé bien évidemment. Puis vient le moment d’admirer le château de Quéribus, autre merveille de l’époque des Parfaits.

Arrivée à Opoul-Périllos, point final de tout périple asmodéen. Ici le paysage change du tout au tout, et la riante verdure audoise fait place à la roche la plus dépouillée. Le spectacle est martien, et je ne peux m’empêcher de songer à Cydonia........ Mais point de pyramides ou de  visage énigmatique, mais une sombre forteresse, construite au pied d’un village qui s’appelait Salvaterrat. Le petit village de Périllos, abandonné depuis 1972, se trouve à deux kilomètres et demi derrière la citadelle. Et on comprend aisément son abandon : c’est le cul-de-sac du bout du monde. Deux voitures immatriculées en Allemagne sont garées à l’entrée du village fantôme. Maîtrisant quelque peu la langue de Goethe, je comprends que leurs passagers font partie de ce que l’on appelle communément la race des chercheurs-creuseurs. La piste de « la petite poire » aurait-elle perturbé la Germanie ? De façon plus prosaïque, je me concentre sur les richesses de l’une des caves-coopératives d’Opoul, afin de faire un petit plein de cet excellent cru qu’est le vin du Roussillon. Je discute sur le parking avec un indigène jeune et fort sympathique, ayant remarqué dans ma voiture le « Guide de RLC ». Il m’explique qu’effectivement de nombreuses légendes bercent la région, certains voyant quelque part dans le site le tombeau de Marie-Madeleine ou....... du Christ. Il est vrai que la caillasse est truffée de passages souterrains et que les panneaux « fouilles interdites » sont légion......... Je lui parle de ma visite à RLC. Il sourit en disant : «  Ce brave Saunière était un gars robuste et un excellent marcheur, mais d’ici à le faire venir à Opoul.... ».

Je range mon vin, certainement un excellent « Sang du Christ », sans avoir oublié de vérifier, sur la facture, que le code postal de la commune est bien........ 66600 !



Mais la commune est célèbre pour d’autres raisons. Elle est en quelque sorte le point de référence du projet Chronodrome. Un satellite a été lancé à destination de nos descendants, porteur de divers messages. Et il leur a été demandé : « si vous êtes techniquement capables de voyager dans le temps, venez nous faire un petit signe.... dans notre siècle ». Le point de rencontre qui leur est spécifié est.... le château d’Opoul. Aussi, tous les ans, au 1er mai, les Chronodromiens se retrouvent sur le site pour scruter le ciel et attendre....... Et Yves Lignon m’a interdit de sourire de ce projet auquel il participe !
Retour dans la Cité de Carcassonne où je retrouve Philippe Ward qui est venu de Pamiers pour partager mon dernier dîner cathare. Je le félicite chaudement, car son dernier roman, co-écrit avec Sylvie Miller, est présent un peu partout. L’éditeur Cylibris, comme EODS, n’a pas de diffuseur national, mais notre ami de Pamiers s’est décarcassé pour placer dans les librairies locales son excellent ouvrage. Nous faisons un petit point sur l’affaire de RLC et sur la galerie de personnages hauts en couleurs qui ont « enrichi » le dossier. Philippe me parle d’une rencontre avec Gérard de Sède, confirmant ce que m’avait déjà rapporté Yves, à savoir une passion immodérée pour l’eau ferrugineuse. Les démarches que j’ai entreprises pour retrouver sa trace (à Liège ?) risquent de s’avérer vaines, notre auteur étant « un vieux Monsieur très malade ». Philippe est un saunièrologue très averti et possède une bibliothèque fort complète sur le sujet. Il m’a préparé une photocopie du numéro mythique du Charivari sur le Prieuré de Sion.

Puis la conversation dérive sur nos littératures favorites ; pour ce qui est de notre projet d’anthologie « Pacte avec le Diable », l’Ermite de Pamiers me propose d’y inclure le contrat qu’il a passé avec l’un de ses autres éditeurs.............

Vendredi 17 août 2001 :

retour sur Paris, mais l’aventure saunièrisante n’est pas terminée. Rendez-vous à midi avec Christophe Villa Mélé déjà cité. Soyons, précis, Christophe est un ami à Guy Tarade, et c’est par ce dernier que le contact murmurien a été établi. Un rendez-vous plein de symboles puisque nous nous retrouvons à Saint-Sulpice. Un autre élément du Mythe : Jean-Jacques Ollier, Nicolas Pavillon, le Méridien de Paris, sans parler de l’hypothétique voyage de BS à Paris pour faire décrypter ses mystérieux parchemins par un collègue…. de Saint-Sulpice. Une étude reste à faire pour mettre à plat ces liens certainement fort discutables. Je suggère à Christophe, sulpicien émérite, de creuser le sujet.

Nous allons nous restaurer aux « Charpentiers », à l’ombre de l’église. Christophe est un chercheur chaleureux doublé d’un excellent musicien. Sa passion ? Mettre en musique les œuvres de Jules Verne. Et je dois avouer qu’il y parvient de façon convaincante [6] . On l’aura compris, sa recherche sur RLC est fortement inspirée par la démarche de l’écrivain nantais et l’a amené à plonger dans les Mystères du Bugarach. Il a sillonné la région et fait d’étranges découvertes qui touchent à l’ufologie et aux portes temporelles. Mais nous lui avons laissé le soin de développer le sujet......
Philippe Marlin


[1] Voir notamment sur Rennes-les Bains, le Guide Médical et Topographique du Dr J. Gourdon de 1874, réédité par les Amis de l’Insolite.

[2] Cf notre autre étude.

[3] Notre forum de discussion sur internet consacré à l’affaire de RLC.

[4] l’un des intervenants sur Serpent_Rouge

[5] cf nos Chroniques où les travaux d’AD sont largement commentés.

[6] La publicité est encore gratuite, et si vous voulez écouter du Jules Verne, contactez Christophe au 06.22.86.33.42.

 

La Saunièrologie vous intéresse ?

Rejoignez les équipes de chercheurs-internautes de l’ODS sur Serpent Rouge ; un forum de travail entièrement consacré à l’étude du Mystère. Vous y discuterez avec Guy Tarade, Patrick Mensior, Stella Maris, Philippe Ward, Joseph Altairac, Jean-Luc Rivera, André Douzet, Yves Lignon, André Goudonnet, Torkain et beaucoup d’autres…….

On se connecte sur : http://fr.groups.yahoo.com/group/Serpent_Rouge/

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